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Il y a trente ans, la France lançait l'opération Turquoise

Jean-Noël Ba-Mweze
21 juin 2024

Trente ans après l'opération militaire Turquoise mise en place pendant le génocide des tutsis au Rwanda, les autorités de Kigali continuent de dénoncer la coresponsabilité de la France dans les massacres.

Des soldats de l'opération Turquoise
En juin 1994, la France met en place l'opération Turquoise avec 2.500 soldatsImage : dpa/picture alliance

Au début des années 1990, le Front patriotique rwandais, une rébellion tutsi en exil en Ouganda, dirigée par l'actuel président Paul Kagame, lance une offensive contre le président Juvénal Habyarimana, un hutu, accusé de vouloir éliminer la minorité tutsi.

Des négociations pour résoudre la crise se tiennent à Arusha, en Tanzanie, où la France tente d'imposer un accord de démocratisation en 1993. Mais l'accord n'est pas respecté.

Le 6 avril 1994, la mort de Juvénal Habyarimana dans le crash de son avion, abattu par un missile, marque le début du génocide.

L'opération Turquoise

En juin 1994, la France, secondée par le Sénégal, met en place l'opération Turquoise avec 2.500 soldats déployés au Rwanda sous mandat onusien pour arrêter les massacres. Une opération qui intervient tardivement, deux mois après le début du génocide. 

Selon un rapport établi en 2021 par une commission d'historiens dirigée par Vincent Duclert, ce retard serait la conséquence d'une divergence entre le président français François Mitterrand et Édouard Balladur, son Premier ministre, sur la stratégie à adopter au Rwanda

Le président français de l'époque François Mitterrand lors d'un déplacement à Aix-en-Provence en 1994Image : Georges Gobet/AFP

L'Elysée, proche du pouvoir rwandais en place, voulait mener une opération militaro-humanitaire pour venir en aide aux populations civiles, mais aussi s'interposer entre l'armée rwandaise et les rebelles du Front patriotique rwandais, le FPR, afin de stopper leur offensive sur Kigali, la capitale du pays.

Des critiques

Paris souhaitait imposer, selon les accords d'Arusha, un partage du pouvoir entre le FPR et le gouvernement intérimaire rwandais, le GIR, mis en place après l'attentat du 6 avril 1994 qui a coûté la vie à Juvénal Habyarimana.

De son côté, le gouvernement d'Edouard Balladur était contre l'interposition entre les belligérants. Il voulait plutôt limiter l'opération à un caractère humanitaire.

Des divergences qui, selon Kigali, ont empêché de venir plus tôt au secours des victimes du génocide.

Les autorités actuelles du Rwanda accusent ainsi la France d'avoir été coresponsable des massacres commis par les hutus. L'inaction de l'armée française, une fois déployée sur place, a aussi été critiquée, notamment lors des terribles massacres de la colline de Bisesero, en juin 1994.

Jean-Noël Ba-Mweze Correspondant à Kinshasa en RDC pour le programme francophone de la Deutsche Welle@ba_mweze