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Sans surprise, Paul Kagame reste l'homme fort de Kigali

La rédaction francophone
16 juillet 2024

L’élection présidentielle a offert un nouveau plébiscite au président rwandais, qui a recueilli 99,15% des voix sur 79% des bulletins dépouillés, lui permettant d’effectuer un quatrième mandat.

Le président rwandais Paul Kagame vote à l'élection présidentielle (photo d'illustration)
Neuf millions de Rwandais étaient appelés aux urnes lundi pour la présidentielle et les législatives (photo d'illustration)Image : Brian Inganga/AP/picture alliance

Arrivé au Rwanda en 1994 à la tête de la rébellion du Front patriotique rwandais (FPR), Paul Kagame, qui est aujourd’hui âgé de 66 ans, dirige le pays depuis trente ans.

D'abord vice-président et ministre de la Défense – mais il était alors le dirigeant de fait du pays – il en devient le président en 2000, élu par le Parlement après la démission de Pasteur Bizimungu.

Paul Kagame est ensuite élu à quatre reprises au suffrage universel : en 2003, 2010, 2017 et donc 2024.

"Personne ne peut refuser de voter Kagame" (Bernard Ntaganda)

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Face aux résultats de l’élection de ce 15 juillet, la journaliste belge Colette Braeckman, spécialiste de la région des Grands lacs, rappelle qu’une majorité de la population rwandaise fait confiance à Paul Kagamé pour maintenir la sécurité et assurer un certain progrès social.

" Il occupe tout l’espace politique, ce qui est une force, mais c’est aussi une faiblesse parce qu’après trente ans d’exercice sans partage du pouvoir, on va surtout miser sur la victoire, on va afficher des chiffres triomphalistes et faire l’impasse sur certains déboires, notamment dans les réactions internationales face à la guerre au Kivu ou les petites tensions avec la Grande Bretagne, suite à l’abolition de l’accord sur les migrants, " confie la journaliste à la DW.

Crédité du spectaculaire redressement économique du Rwanda après le génocide de 1994, Paul Kagame est néanmoins critiqué pour le manque d'ouverture démocratique dans le pays et la répression des opposants.

"Une victoire sans triomphe politique"

Réagissant aux scores réalisés par le président rwandais, Bernard Ntaganda, président du parti social Imberakuri, qui n’a pas pu se présenter à l’élection présidentielle, parle d’une victoire sans gloire ni triomphepolitique et populaire. Pour lui, les élections ne sont pas libres et il parle d’un système dictatorial au Rwanda.

Paul Kagame est un des chefs d'Etat les plus clivants du continent africain (photo d'illustration)Image : Guillem Sartorio/AFP via Getty Images

"Personne ne peut refuser de voter Kagame. Comment peut-on refuser lorsqu’il y a un policier, un militaire avec un pistolet ou un fusil à la main ? Vous ne pouvez pas refuser de voter pour Paul Kagame. C’est comme ça que fonctionne le système dictatorial du FPR" estime Bernard Ntaganda.

Voter convenablement sous peine de sanction

Victoire Ingabire est une figure de l’opposition rwandaise. Elle insiste sur le fait que le score réalisé par le président rwandais n’est possible que dans un environnement où les citoyens n’ont pas de choix. Cette situation a privé la population de la pluralité de candidats qu’un système basé sur un véritable multipartisme pourrait leur offrir.

Paul Kagamé jouit d'une forte popularité pour avoir relevé le pays, exsangue au sortir du génocide (photo d'illustration)Image : Marco Longari/AFP via Getty Images

" Tout est contrôlé par le Front patriotique rwandais (FPR) et ceux qui seront identifiés comme n’étant pas fans du FPR seront punis d’une façon ou d’une autre, " explique Victoire Ingabire.

Selon elle "des fois, c’est au niveau économique, si vous avez un business, on fait tout pour vous empêcher de fonctionner. Ou une punition administrative : vous pouvez demander un service auprès d’une administration étatique et vous n’allez pas l’obtenir. Dans mon cas, comme je suis connue comme opposante, il est très difficile que j’arrive à obtenir un service dans les administrations de l'Etat. C’est quasi impossible. "

La journaliste et écrivaine britannique Michela Wrong, qui a publié l’an dernier “Rwanda : assassins sans frontières”, estime que tout dirigeant crédité d'un tel chiffre ne prend même pas la peine de prétendre être un démocrate. Pour elle, "au Rwanda, il est question d'un régime unipersonnel qui se fait passer pour une démocratie multipartite et qui met la communauté internationale au défi de le dénoncer".