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climatSénégal

2,5 milliards d'euros pour la transition verte au Sénégal

Tania Krämer
23 juin 2023

Le Sénégal a signé un partenariat avec des pays riches pour une "transition énergétique juste". Cela implique d'allier objectifs climatiques et de développement.

Techniciens à l'ouverture du site de production d'énergie solaire de Bokhol au Sénégal, le 22 octobre 2016
Des techniciens à l'ouverture du site de production d'énergie solaire de Bokhol au SénégalImage : Seyllou/AFP/Getty Images

Le Sénégal a signé jeudi (22.06) un partenariat pour une transition énergétique, ou JETP, avec le groupe des partenaires internationaux, qui comprend l'Allemagne, la France, l'Union européenne, le Royaume-Uni et le Canada. C'est le deuxième accord de ce type signé par un pays africain, après l'Afrique du Sud en 2021, et le quatrième en tout.

Cette déclaration intervient au cours du Sommet pour un nouveau pacte financier, à Paris. L'objectif des discussions est de repenser le système financier international, pour qu'il soit plus juste, plus respectueux de l'environnement, plus solidaire.

Une quarantaine de chefs d'Etats étaient rassemblés à Paris pour le Sommet pour un nouveau pacte financier mondialImage : picture allianceLemouton Stephane/Pool/ABACA/

2,5 milliards d'euros

C'est un partenariat qui doit répondre aux défis spécifiques au Sénégal. Allier objectifs climatiques, mais aussi développement du pays.

Une promesse ambitieuse, dont le président Sénégalais Macky Sall a fait l'annonce, ce jeudi, au premier jour du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial : "Le Sénégal s'est engagé à augmenter sa part d'énergie renouvelable à 40 % en 2030, en sept ans, avec un financement d'environ 2,5 milliards d'euros. Nous pensons que si cet argent est rassemblé, nous pourrons atteindre voire dépasser cet objectif."

Concrètement, cela signifie que le Sénégal s'engage à transformer son système énergétique, et les pays développés à lui trouver des financements.

Des besoins d'industrialisation

Malgré tout, le Sénégal est encore grandement dépendant des énergies fossiles. Il dispose d'importants gisements de pétrole et de gaz, dont l'exploitation pourrait contribuer à la croissance économique du pays.

Pour NJ Ayuk, président exécutif de la chambre africaine de l'énergie, la priorité du Sénégal doit être de s'industrialiser pour répondre à des besoins de développement énergétique.

"Le changement climatique et la pauvreté énergétique sont les deux faces d'une même médaille.", soutient-il. "Et nous devons nous attaquer aux deux pour parvenir à l'objectif "zéro carbone". Mais pour cela, les pays développés doivent décarboner leur économie, pendant qu'un pays comme le Sénégal peut s'industrialiser et croître en consommant peu de carbone, pour l'avenir."

Cela reviendrait à se concentrer sur les besoins spécifiques du pays en terme d'accès universel à l'électricité ou encore d'emplois.

Entre énergies renouvelables, "vertes", et fossiles

Le Sénégal dispose d'abondantes ressources renouvelables, notamment solaires et éoliennes, pour se détourner des énergies fossiles. En 2021, Taïba Ndiaye, le plus grand projet éolien d'Afrique de l'Ouest, a été inauguré dans le pays.

Dans la déclaration de partenariat publiée hier, le pays a réaffirmé sa volonté d'utiliser ses ressources en gaz naturel comme, je cite, "une énergie de transition dans la perspective d'un développement socio-économique sobre en carbone." Le gaz naturel reste une "énergie verte" selon l'Union européenne.

Le Sénégal migre vers le solaire

03:31

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"Une semi-bonne nouvelle" ?

Mais comme souvent, les perspectives de développement s'opposent à celles d'un avenir décarboné. Yamina Sahel est économiste et spécialiste des politiques climatiques à l'Observatoire français des conjonctures économiques. Selon elle, ce nouveau partenariat est une occasion manquée de faire encore mieux.

"C'est une semi-bonne nouvelle", résume la chercheuse. "Ils peuvent utiliser les leçons apprises de nos erreurs en Occident, pour construire les infrastructures du XXIe siècle, et même les inventer. Mais c'est dommage, justement, qu'un partenariat qui se donne comme objectif la transition juste et le développement n'intègre pas la réduction de la demande."

Yamina Sahel va jusqu'à parler d'une "erreur stratégique énorme." Intégrer la réduction de la demande, ce serait penser en termes d'efficacité énergétique. Autrement dit, ne pas seulement augmenter la part d'énergies renouvelables, mais faire en sorte que le pays consomme moins.

Une offre renouvelable insuffisante

Alors que toute la population sénégalaise n'a pas accès à l'électricité, Yamina Sahel estime peu réaliste que les énergies renouvelables puissent absorber la demande sans une meilleure efficacité énergétique. 

"Aujourd'hui, au Sénégal, l'accès aux services de la modernité est très limité, et donc plus il y aura de personnes qui auront accès à ces services-là, et c'est légitime de la part de la population, plus la demande augmentera", affirme l'économiste.

Ecoutez le reportage

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Selon elle, il est peu probable que le renouvelable parvienne à compenser à la fois cette augmentation de la demande et le remplacement de celle qui est déjà satisfaite par le biais des énergies fossiles. Par ailleurs, beaucoup d'argent a déjà été investi dans les gisements de gaz naturel.

Le partenariat n'est pour l'instant qu'un projet qui devrait se concrétiser dans l'année à venir sous la forme de plans d'investissement et de financement.