1. Aller au contenu
  2. Aller au menu principal
  3. Voir les autres sites DW

Soldats rwandais en RDC : un secret de polichinelle

29 avril 2020

Contrairement aux affirmations du président Paul Kagame, des troupes rwandaises fidèles au régime de Kigali, font souvent des incursions dans l’est de la RDC. 

Präsident Ruanda Paul Kagame
Image : Imago/Zumapress/E. Contini

Kagame 'est assez prudent par rapport à la justice internationale' (B. Musavuli) - MP3-Stereo

This browser does not support the audio element.

Les faits attestent la présence rwandaise à l’est de la République démocratique du Congo (RDC) même si le président Paul Kagame affirme le contraire. Evoquant la province du Sud-Kivu, à l’est de la RDC, Paul Kagame a fait savoir, lundi (27.04.20) qu’"il n'y a aucun soldat des RDF (Forces de défense rwandaises) dans cette partie du monde". 

Le président rwandais ne nie pas cependant l’échange d’information entre les deux pays pour lutter contre les rebelles hutus rwandais des forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR). 

Enième dénégation de Kigali

Selon Boniface Musavuli, analyste des questions sécuritaires, les incursions de militaires rwandais en RDC relèvent d'un secret de polichinelle : 

"Les troupes rwandaises sont dans l’est du Congo depuis la guerre de l’AFDL (Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo), c’est-à-dire en 1996. Ces troupes ont trouvé une autre façon de se dissimuler en revêtant les uniformes de l’armée congolaise. Paul Kagame ne peut pas le reconnaître parce que s’il le faisait, ça deviendrait une affaire de droit international. C’est un homme qui est assez prudent par rapport à la justice internationale."

En 2009, des soldats rwandais se retirent de la ville de Goma, dans l'est de la RDC après une offensive controversée contre les FDLRImage : picture-alliance/dpa

Sujet politiquement délicat

Le Groupe d’étude sur le Congo (GEC) a affirmé, en se basant sur "plusieurs sources militaires, diplomatiques et de la société civile", que des soldats des forces spéciales rwandaises ont participé, fin novembre, à une offensive en RDC. Ce n’est pas la première fois que le Rwanda nie la présence de son armée chez son voisin, relève Jean-Claude Mputu, spécialiste de ce pays. 

Il n’y a eu aucune réaction des autorités congolaises après les dénégations de Paul Kagame. Jean-Claude Mputu pense que reconnaître la présence rwandaise en territoire congolais est un casse-tête pour Kinshasa. 

"Les dirigeants politiques qui assumeront cet état de fait savent qu’ils vont faire l’objet d’un courroux populaire inédit, ça c’est une réalité aujourd’hui. Donc ils font semblant de nier alors qu’entre eux, en off, ils reconnaissent clairement cette présence."

Diplomatie transparente : une condition pour la paix 

De son côté, Paul Kagame affirme que ce sont des militaires burundais qui sont présents dans le Sud-Kivu congolais, voisin du Burundi. "Ce sont des éléments de l’armée burundaise qui travaillent officiellement pour leur pays", croit savoir le chef de l’Etat rwandais. 

Pour le président Tshisekedi comme pour ses prédécesseurs, admettre la présence rwandaise sur le territoire congolais relève du casse-têteImage : G. Kusema

Onesphore Sematumba, analyste à l’International Crisis Group (ICG), estime qu’une diplomatie transparente est nécessaire dans la région, en vue de l’instauration de la paix : "Tant que l’est congolais va rester le ventre mou de la sécurité régionale, tant que les rebelles armés y trouveront leur sanctuaire, les armées étrangères seront tentées de traverser."

Selon le site actualite.cd, des rebelles hutus rwandais du CNRD (Conseil national pour la renaissance et la démocratie) ont encore fait une incursion dans le Sud-Kivu mardi (28.04.20) nuit. Un enfant de sept ans aurait été tué, des biens des habitants emportés.

Dans un communiqué publié lundi (27.04.20), les rebelles hutus rwandais des FDLR ont démenti leur implication vendredi (24.04.20) dans une attaque qui a fait une dizaine de morts, dont des écogardes du parc de Virunga. Les FDLR indiquent que le territoire où a eu lieu l’attaque est sous contrôle de militaires rwandais "en connivence avec certains officiels congolais".