Têtes de Turcs
11 octobre 2010Horst Seehofer n’est pas n’importe qui. Dans une interview accordée au magazine Focus, le président de la Bavière et chef de la CSU, l’aile bavaroise de la CDU, le parti chrétien-démocrate au pouvoir, est venu mettre du sel sur la plaie de la question musulmane en Allemagne. Horst Seehoffer a déclaré que République fédérale n’avait « plus besoin d’immigration en provenance d’autre zones culturelles ». Celui-ci ne s’est ensuite pas privé de préciser qu’il pensait à la Turquie et aux pays arabes.
Diplomatie du ballon rond
Cette interview intervient à un moment où le débat sur l’intégration des migrants musulmans divise la population allemande. Ce débat a été relancé par la publication du livre de Thilo Sarrazin, ancien administrateur de la Bundesbank dont les propos ont reçu un certain soutien au sein de l’opinion publique. Celui-ci accuse les musulmans de ne pas vouloir s’intégrer et de vivre dans une société parallèle.
En réaction, le président Christian Wulff a rappelé que l’Islam faisait partie de la société allemande et ne lui était donc pas étrangère. Enfin, en marge du match de football entre l’Allemagne et la Turquie, vendredi soir à Berlin, la chancelière Angela Merkel qui recevait le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a appelé les Turcs vivant en Allemagne à mieux apprendre la langue de Goethe pour trouver leur place dans la société. C’est donc dans ce contexte que Horst Seehoffer est venu mettre de l’huile sur ce débat enflammé.
Droite de la droite
Les déclarations du président de la Bavière sont néanmoins à mettre sur le compte d’une stratégie politique précise. Car que voit-on en Europe ? Des pays comme la Suède, le Danemark, les Pays-Bas, l’Italie, la Suisse où des partis d’extrême-droite dénonçant une supposée islamisation de l’Europe rencontrent des succès électoraux. En Allemagne ce n’est pas le cas car la CDU-CSU a toujours barré la route à ce genre de parti. Aujourd’hui, le scénario catastrophe pour les barons conservateurs serait de voir se développer un parti xénophobe à l’aile droite du parti au pouvoir. C’est donc pour barrer cette route à droite que Horst Seehoffer fait ce genre de déclarations. Mais à l’image de Nicolas Sarkozy en France, le risque est qu’une fois ouverte la boite de Pandorre, ce soit l’extrême-droite qui, à la fin, profite de ce genre de discours.
Auteur : Jean-Michel Bos
Edition : Mireille Dronne