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Terrorisme : échec des juntes au Mali et au Burkina Faso

31 octobre 2022

Selon l’ONG ACLED, les attaques djihadistes ont augmenté en un an au Mali et au Burkina Faso malgré les putschs survenus dans ces deux pays.

Assimi Goïta lors de sa cérémonie de prestation de serment en tant que président de transition du Mali à Bamako, Mali, le 7 juin 2021
Selon les Etats-Unis, la situation sécuritaire au Mali s’est considérablement détériorée ces dix derniers moisImage : Habib Kouyate/Xinhua/IMAGO

Selon l’Acled (Armed conflict location and event data), une organisation qui recense tous les conflits et événements violents dans le monde, les attaques djihadistes au Mali et au Burkina Faso ont augmenté au cours de la dernière année.  

Les deux pays ont enregistré plus d’un millier d’attaques qui ont causé la mort de plus de 4.000 personnes. Or, entre octobre 2021 et octobre de cette année, Bamako était et reste d’ailleurs dirigé par des militaires.  

Dans le cas du Burkina Faso, les militaires ont pris le pouvoir par les armes en janvier dernier. 

Ould Abdellah, ancien ministre et spécialiste des questions de sécurité, note que malgré les putschs, "l’insécurité persiste et s’aggrave".

"Les attaques continuent sous les militaires parce que les islamistes dans notre région sont largement des rébellions de citoyens contre les gouvernements centraux", explique Ould Abdellah à la DW. "Le seul problème avec les militaires, c’est qu’ils se mettent eux-mêmes dans une position extrêmement difficile. On ne peut pas gérer un pays, ses multiples problèmes, économiques et sociaux, et en même temps vouloir lutter contre le terrorisme."  

Fragilisation du pays, dissensions au sein de l’armée

Par ailleurs, selon ce spécialiste, les coups d’Etat dans des coups d’Etat, comme ceux intervenus au Mali et au Burkina Faso, fragilisent le pays et créent des dissensions au sein des armées, impactant négativement ainsi la lutte contre le terrorisme.  

Le seul problème avec les militaires, c’est qu’ils se mettent eux-mêmes dans une position extrêmement difficile. (Ould Abdellah)

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L’ONG Human Rights Watch a publié un rapport la semaine dernière faisant le constat que des groupes armés, affiliés au groupe Etat islamique, ont ainsi massacré des centaines de villageois depuis le début de l’année dans le nord-est du Mali, alors que le colonel Assimi Goïta est au pouvoir.  

Au Burkina Faso voisin, treize soldats et deux supplétifs de l’armée ont été tués ce week-end, soit une semaine après l’investiture du président de transition, le capitaine Ibrahim Traoré.  

Fahiraman Rodrigue Koné du bureau régional de Dakar de l’Institut d’études de sécurité, note certes une augmentation des attaques. Mais il se veut prudent sur l’échec des militaires face au terrorisme 

"Quand les armées mènent beaucoup plus d’opérations, des tentatives de récupération des zones contrôlées par des groupes armés terroristes, ces derniers également essaient de pouvoir récupérer et consolider leurs acquis, précise Fahiraman Rodrigue Koné à la DW. Du coup, on assiste à une augmentation des affrontements."  

Echec du tout militaire

Fahiraman Rodrigue Koné constate que l’arrivée des juntes au pouvoir ne règle pas la question terroriste. La solution, selon lui, ne passe en effet pas par le tout militaire.  

Le capitaine Ibrahim Traoré s’est donné pour objectif la reconquête du territoire occupé par les terroristes Image : AA/picture alliance

Le Mali a pourtant annoncé récemment la militarisation de la police et le Burkina Faso, le recrutement de 50.000 supplétifs pour renforcer l’armée.

Selon le juriste et analyste burkinabè Siaka Coulibaly, les militaires ont une analyse étroite de la situation sécuritaire qui comprend mal la structure communautaire des groupes djihadistes.   

Siaka Coulibaly : La structure du terrorisme au Burkina Faso a une dimension plus communautaire que le djihadisme, comme on le dit couramment. Donc, au lieu de mettre en œuvre des stratégies qui incluent d'autres dimensions, on met l'accent sur le tout militaire. Et jusque-là, on constate que cela n'est pas du tout la bonne voie. Et ce qui explique que malgré l'alternance des militaires à la tête du pays, les statistiques des attaques terroristes sont toujours plus grandes que jamais.

 

DW : Cela veut dire que les militaires, ce pourquoi ils accusent les civils et ils viennent au pouvoir, ils échouent aussi justement à régler la question du terrorisme.

Le terrorisme dans ces deux pays ont des dimensions fortement communautaires. Les conflits communautaires en fait.

Dimensions communautaires

Donc, peu importe que ce soit un civil ou un militaire, là n'est pas la question ?

C'est la stratégie à mettre en œuvre qui n'est pas la bonne. Donc, si on fait le tout militaire pour une situation qui est communautaire, elle ne peut pas marcher. Les pouvoirs en place, donc les militaires, ne comprennent pas toujours la complexité de la situation sécuritaire.

Les attaques des terroristes au Burkina Faso ciblent aussi les militaires et leurs supplétifs Image : Vincent Bado/REUTERS

 

Est-ce qu'il y a aussi la structure de l'armée, je parle du commandement. Est-ce que tout ça aussi est à mettre en cause dans l'incapacité des militaires à régler la question ? Est-ce que la structure de l'armée aussi est en question ?

Ce facteur influe peu en réalité parce qu'en réalité, le terrorisme n'est même pas une question qui devrait être adressée par l'armée. Le terrorisme en général doit être adressé par les paramilitaires, comme la police essentiellement. Mais comme dans nos pays, l'armée est plus prépondérante et s'est saisie de la question. Parfois même, comme au Burkina Faso, elle met à l'écart la police et finalement, son mode opératoire ne permet pas de résoudre la question du terrorisme.

 

Est-ce que la militarisation de la police, annoncée par exemple au Mali, peut être une solution selon vous ?

On ne sait pas si le statut juridique du policier change, si sa formation change, si les armes qu'il va utiliser vont changer. Donc tant qu'on n'a pas ces détails, s'il s'agit de faire des policiers des militaires à part entière, on ne change pas le problème.

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