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Se dirige-t-on vers une catastrophe au Tigré ?

Carole Assignon | Cristina Krippahl
4 août 2021

Face à une recrudescence du conflit au Tigré, la situation humanitaire inquiète de plus en plus les organisations internationales.

Image : Nariman El-Mofty/AP/picture alliance

La directrice de l'Agence américaine d'aide internationale (USAID) Samantha Power a appelé ce mercredi (04 août 2021) les forces rebelles tigréennes à se retirer "immédiatement" des régions Amhara et Afar qui bordent la région en proie à un conflit meurtrier qui menace d'enflammer le pays tout entier. 

Alors que les humanitaires travaillent dans un contexte déjà difficile, le gouvernement éthiopien soupçonne ces derniers d'être du côté des forces rebelles, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), voire même de les armer. Des accusations que Martin Griffiths, le secrétaire général adjoint de l'ONU pour les Affaires humanitaires, en visite en Ethiopie a dénoncé, ceci alors que la situation humanitaire semble se dégrader de plus en plus. 

Lire aussi :Le Tigré : un conflit qui dure en Ethiopie

La crainte d'une famine

Manque de matériel médical, coupures de courant fréquentes, graves pénuries de carburant, manque de liquidités dû à la fermeture des banques et chômage croissant après l’arrêt ou le pillage des usines :  dans la province éthiopienne du Tigré, la vie est de plus en plus difficile pour la population. Alyona Synenko, porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour l'Afrique, estime que la situation est très préoccupante. 

"Nous estimons à plus de deux millions le nombre des personnes déplacées (...). La crise et les combats ont affecté l'agriculture. De nombreux agriculteurs n'ont pas pu planter leurs cultures à temps. Ils n'ont pas pu accéder à leurs terres. Ils n'avaient plus accès aux crédits agricoles " explique t-elle.

Des déplacés ayant fuient les violences au Tigré recevant de l'aide alimentaire.Image : Yasuyoshi Chiba/AFP/Getty Images

Lire aussi : La famine menace la région en conflit du Tigré

Dans ce contexte, l'Organisation des Nations unies (ONU) a averti que plus de 400.000 Éthiopiens risquent de mourir de faim.
Dans un récent rapport, l'ONU a critiqué les deux parties engagées dans le conflit d’avoir entravé l'acheminement de l'aide à la population qui est dans le besoin.

Eviter que le conflit se généralise

Le 29 juin, après des revers militaires, le Premier ministre Abiy Ahmed a déclaré un cessez-le-feu unilatéral. Mais après neuf mois de conflit, la paix n’est toujours pas instaurée et la guerre menace de plus en plus "de déborder dans la région", prévient Murithi Mutiga, directeur du projet Corne de l'Afrique à International Crisis Group. Selon lui, tout doit être fait pour mettre un terme au conflit.

"Je pense que nous devons tirer les leçons de l'histoire selon laquelle l'Éthiopie a été confrontée à des défis monumentaux par le passé. Elle les a surmontés. Cela semble être l'une de ses plus graves crises. Compte tenu de ce que signifierait la désintégration de l'Éthiopie, je pense que tout le monde espère et aimerait agir pour éviter cela", précise le chercheur.

Des soldats de l'armée éthiopienne en patrouille au Tigré.Image : Ben Curtis/AP/picture alliance

Les signes de nettoyage ethnique, la famine qui menace et la peur que la violence n'atteigne les pays voisins ont poussé la communauté internationale à accroître la pression sur Addis-Abeba pour que cessent les hostilités. Mais certains pensent que c'est déjà trop tard.

L'Érythrée est impliquée aux côtés du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed depuis le début du conflit. Mais d'autres pays sont également de plus en plus concernés. La Somalie, le Kenya ou encore Djibouti et le Soudan observent avec beaucoup d'anxiété la situation au Tigré.