Tshisekedi-Kabila, épilogue d'une union qui a dirigé la RDC
23 mai 2025
Après la levée de ses immunités parlementaires ce jeudi (22.05) par le Sénat qui a ainsi autorisé les poursuites judiciaires à son encontre, Joseph Kabila devra faire face à la justice militaire, suite à des accusations de trahison et de crimes de guerre. L'Etat congolais l'accuse de soutenir les rebelles de l'AFC-M23 qui occupent une partie de l'est de la RDC.
L'union entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi a débuté à l'issue de l'élection présidentielle de 2018, remportée par Félix Tshisekedi, alors que le Front commun pour le Congo, le FCC de Joseph Kabila, remportait la majorité au Parlement.
Joseph Kabila a alors cédé pacifiquement le pouvoir à son successeur en janvier 2019, une première dans l'histoire de la RDC.
Les deux hommes, à l'issue d'un accord politique passé, alors que le résultat de l'élection présidentielle était mis en doute par l'Eglise catholique, ont alors convenu de cogérer le pays .
L'entente a duré jusqu'à leur rupture politique, en décembre 2020. Le conflit s'est ensuite accentué avec la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda, qui, depuis juin 2022, occupe une partie de l'est du pays.
Jospeh Kabila nie toute accointance avec le M23
Félix Tshisekedi accuse son prédécesseur de soutenir les rebelles. Une théorie contestée par Joseph Kabila et ses partisans.
Les tensions entre les deux hommes étaient néanmoins prévisibles, selon Yvon Muya, auteur du livre "La révolution congolaise".
"En 2019, on s'est retrouvé avec une situation inédite dans laquelle un chef d'Etat, dépourvu de majorité parlementaire, s'est retrouvé être l'otage de cette majorité qui était, à l'époque, dominée par le FCC de Joseph Kabila, explique Yvon Muya. Félix Tshisekedi qui a, à ce moment-là, subi des humiliations, est peut-être en train de prendre sa revanche sur le clan Kabila".
Une opinion soutenue par Trésor Kibangula, de l'Institut Ebuteli de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence, qui pense que "les derniers signaux envoyés par Kabila par sa tribune dans le journal (sud-africain) Sunday Times, ses consultations politiques et surtout ses vrais-faux retours annoncés à Goma ont été perçus comme une tentative de réapparition dans l'arène. Le pouvoir a donc réagi avec fermeté, parfois même avec précipitation. Beaucoup y voient une réponse politique à une provocation politique".
Levée de l'immunité de Joseph Kabila
C'est de là d'ailleurs qu'est partie la procédure de levée des immunités de Joseph Kabila afin de le livrer à la justice militaire. Mais il bénéficie de la présomption d'innocence, comme l'explique le professeur Moïse Cifende, enseignant à l'université catholique de Bukavu.
Selon lui, "il est innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie. Peut-être ses avocats vont-ils démontrer son innocence. Nous exhortons donc la justice à servir avec impartialité. Sinon, Kabila aura droit à toutes les voies de recours, y compris devant la cour africaine (des droits de l'Homme et des peuples), si la justice n'est pas rendue de manière équitable."
Ce serait la première fois en RDC qu'un ancien président serait poursuivi en justice. Un précédent qui, s'il est confirmé, pourrait servir de jurisprudence pour l'avenir.