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ConflitsMoyen-Orient

Guerre Israël-Hamas : les déflagrations dans la sous-région

7 octobre 2024

Un an après les attentats du Hamas contre Israël et les frappes sur la bande de Gaza et la Cisjordanie, le conflit a changé la donne dans plusieurs pays du Proche-Orient.

Explosion dans le sud du Liban,vue depuis le nord d'Israël : un nuage de fumée s'élève au-dessus d'un village (photo du 7 octobre 2024)
Explosion dans le sud du Liban,vue depuis le nord d'IsraëlImage : Leo Correa/AP Photo/picture alliance

Il y a un an jour pour jour, le Hamas lançait son attaque terrroriste sur Israël.

Israël a commémoré ce lundi les victimes des attentats terroristes du 7 octobre 2023, des attentats perpétrés par des militants du Hamas et qui ont été les plus meurtriers de l'histoire du pays. Au moins 1.200 personnes ont été tuées ce jour-là, des civils pour l'essentiel.
En réaction à ces attaques, le gouvernement israélien a déclenché la guerre à Gaza et étendu ses frappes à d'autres zones du Proche et Moyen-Orient.
Une série de commémorations et de rassemblements ont eu lieu dans tout le pays.
Le président israélien, Isaac Herzog, a ouvert les commémorations avec les familles endeuillées sur le site du festival de musique Nova. 
Au même moment, les familles des otages encore détenus à Gaza se sont rassemblées devant la résidence du Premier ministre Benjamin Netanyahu à Jérusalem pour se tenir debout pendant deux minutes au son d'une sirène d'alarme.
Sur les 251 otages enlevés le 7 octobre, 97 sont toujours aux mains de leurs ravisseurs. L'Etat hébreu estime que 64 d'entre eux seraient toujours en vie.
Leur libération est l'un des objectifs de guerre du gouvernement Netanyahu.

Lors de la cérémonie en hommage aux victimes du Nova FestivaImage : JOHN WESSELS/AFP

Dans la bande de Gaza, la quasi-totalité des 2,4 millions d'habitants ont été déplacés et au moins 41.909 Palestiniens ont été tués dans les frappes israéliennes en un an. Les victimes sont en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas - des données jugées fiables par l'ONU.

Cette guerre  a eu des répercussions sur l'ensemble des pays de la région.

Des soldats israéliens lors d'une opération à Kafr Aqab, près de RamallahImage : ZAIN JAAFAR/AFP
  • L'Arabie-Saoudite

A la suite des attentats du 7 octobre 2023, l'Arabie saoudite a suspendu ses négociations en vue d'une normalisation de ses relations avec Israël. 

Selon Sebastian Sons, chercheur principal pour le groupe de réflexion allemand CARPO, le 7 octobre a ravivé au sein de la société saoudienne un sentiment de solidarité envers les Palestiniens, tandis que les dirigeants saoudiens espèrent toujours une normalisation future avec l'Etat hébreu.

"Les dirigeants saoudiens considèrent le conflit comme une menace directe pour leur volonté de transformation ambitieuse, sur le plan socio-économique, car l'Arabie saoudite cherche à diversifier son économie en s'éloignant du pétrole et en investissant massivement dans des secteurs non pétroliers tels que le tourisme, le divertissement ou le sport."

 D'où un exercice d'équilibre diplomatique difficile, pour l'Arabie Saoudite qui, d'un côté, critique l'action militaire d'Israël, et de l'autre, tente de parvenir à une solution négociée au conflit.

  • Le Liban

Peu après les attaques terroristes du Hamas contre Israël, l'influente branche armée libanaise du Hezbollah, classée comme groupe terroriste par l'Union européenne, a commencé à frapper le nord d'Israël.

Kelly Petillo, chercheuse sur le Moyen-Orient au Conseil européen des relations étrangères, explique qu'au début, le Hezbollah a été critiqué pour entraîner le Liban dans une guerre avec Israël. D'autant que le mouvement avait bloqué pendant des mois l'élection d'un président au Liban.

"Le Hezbollah a donc pris en otage la politique libanaise. Mais depuis le 7 octobre, nous avons également constaté des expressions de solidarité parmi certaines parties de la société libanaise qui sont très frustrées par la conduite épouvantable d'Israël à Gaza, et par le manque de diplomatie internationale ; des gens qui commencent à voir le Hezbollah comme le seul garant de la solidarité avec les Palestiniens", analyse Kelly Petillo.

Après près d'un an de ce que les politologues appellent des "combats contenus" - ce qui signifie que les attaques visaient d'abord les infrastructures militaires -, la situation s'est aggravée courant septembre.

Le roi Abdallah II. de Jordanie craint une nouvelle crise des réfugiés dans son paysImage : Loey Felipe/UN Photo/Handout via Xinhua/picture alliance
  • La Jordanie

La Jordanie voisine a signé un traité de paix avec Israël en 1994. Mais depuis un an, elle est sur la corde raide. Là encore, le pays est divisé entre le fort soutien interne à la cause palestinienne et les relations avec Israël.

La reine Rania est elle-même d'origine palestinienne. Mais le roi Abdallah II de Jordanie a indiqué à plusieurs reprises que le pays n'était pas disposé à accueillir davantage de réfugiés palestiniens.

Cela mettrait en péril la cause palestinienne en général et constituerait une violation directe du traité de paix, selon Kelly Petillo :

"Toutefois, avec l'ouverture d'un nouveau front potentiel, non seulement au Liban, mais aussi en Cisjordanie où les attaques se sont intensifiées, la Jordanie se trouve confrontée à son scénario cauchemardesque, à savoir une nouvelle crise potentielle de réfugiés en provenance de Cisjordanie. Celle-ci constituerait non seulement une menace existentielle pour la cause palestinienne en général, qui est une question extrêmement importante pour la population jordanienne, mais aussi pour la paix israélo-jordanienne, car elle constituerait une violation directe du traité de paix de 1994."

C'est pourquoi, poursuit la politologue, "le roi Abdallah et la reine Rania n'ont eu de cesse de tendre la main aux États-Unis et au reste du monde, à la fois au niveau gouvernemental américain, mais aussi publiquement pour s'assurer que Joe Biden contribue à empêcher que"  la guerre ne s'étende.

Plusieurs manifestations de masse ont été organisées pour protester contre la campagne brutale d'Israël à Gaza en réponse aux attaques du 7 octobre. Des manifestants ont également appelé à la fin du traité de paix israélo-jordanien.

  • La Cisjordanie occupée

Peter Lintl, chercheur associé au service Afrique et Moyen-Orient de l'Institut allemand pour les affaires internationales et de sécurité, souligne que "la situation en Cisjordanie était déjà très tendue avant le 7 octobre" .

"L'Autorité palestinienne est faible depuis des années, les colons juifs attaquaient les Palestiniens, et l'actuel gouvernement israélien d'extrême droite a exacerbé les tensions en déclarant dans son programme de coalition que la Cisjordanie occupée, ou, comme ils l'appellent, la Judée et la Samarie, ne peut appartenir qu'au peuple juif", détaille le chercheur.

Les tensions entre l'armée israélienne et plusieurs groupes militants palestiniens de Cisjordanie occupée se sont encore accrues courant septembre. Peter Lintl qualifie la Cisjordanie occupée de "poudrière qui peut exploser à tout moment".

Les protestations contre le régime de Bachar al-Assad se font moins visiblesImage : Monasse Thierry/abaca/picture alliance
  • La Syrie

"La guerre qui a éclaté le 7 octobre a encore détourné l'attention des médias de la Syrie et de la guerre qui y dure depuis plus de 13 ans", estime pour sa part Lorenzo Trombetta, analyste du Moyen-Orient basé à Beyrouth et consultant pour des agences des Nations unies.

La guerre civile en Syrie est de plus en plus dominée par des puissances étrangères, telles que la Russie, l'Iran, la Turquie, Israël et les États-Unis.

"Tous les acteurs affirment qu'ils luttent contre le terrorisme et qu'ils visent à ramener stabilité et sécurité [en Syrie]", expliqué Lorenzo Trombetta.

Le président syrien Bachar al-Assad est quasiment redevenu quasiment fréquentable. Il a été accueilli en Europe et dans des pays arabes, alors qu'il avait été largement isolé en raison de la répression qu'il a exercée sur la population syrienne depuis 2011.

D'où l'analyse de Lorenzo Trombetta : "Sur le plan intérieur, l'emprise d'Assad sur le pouvoir ne semble plus remise en question".

Au cours de l'année écoulée, Bachar al-Assad est resté silencieux sur les événements et les conséquences du 7 octobre. "Son approche est celle d'une diplomatie discrète, loin des projecteurs des médias, visant à atteindre des objectifs intérieurs à long terme", estime Lorenzo Trombetta.

Image : Khalil Hamra/AP Photo/picture alliance
  • L'Egypte

De tous les pays de la région, seule l'Égypte a trouvé un moyen de tirer parti de la crise pour renforcer son importance géopolitique. C'est en tout cas le point de vue de Timothy E. Kaldas, directeur adjoint de l'Institut Tahrir pour la politique du Moyen-Orient, basé à Washington.

Le président égyptien Abdel Fattah el-Sissi a coopéré avec Israël pour acheminer des marchandises à Gaza et aider à maintenir le siège.

En outre, le rôle central de l'Égypte dans les négociations sur le cessez-le-feu a rétabli l'importance de l'Égypte sur l'échiquier mondial.

"En retour, le Caire a gagné beaucoup de soutien supplémentaire de la part de Washington", note Timothy E. Kaldas. La Maison Blanche a en effet accordé à l'Égypte une aide militaire qui s'élève en tout à 1,16 milliard d'euros en 2024.

"C'est la première fois que l'administration Biden accorde le montant total", souligne Thimothy E. Kaldas, qui précise que, par le passé, Washington retenait au moins une partie de l'aide conditionnée aux droits de l'homme.

"Pourtant, en réalité, les résultats de l'Égypte sont nettement moins bons sur ce front", constate le chercheur.

Le président al-Sissi en tire aussi profit sur le plan intérieur : depuis le 7 octobre, les Égyptiens se concentrent moins sur la détérioration de l'économie égyptienne que sur les "horribles crimes de guerre commis par Israël contre les civils palestiniens vivant à Gaza" qui accaparent désormais leur attention, selon Timothy E. Kaldas.

Et le chercheur de conclure que dorénavant, les dirigeants égyptiens devront eux aussi se livrer à un numéro d'équilibriste pour conserver le soutien renouvelé de l'Occident.

 

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