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Nouvelle ère pour le Bénin et l'histoire de l'art africain

Rodrigue Guézodjè
12 novembre 2021

Après le retour de 26 oeuvres des trésors royaux d'Abomey, le Bénin devient un modèle dans les processus de restitution

Arrivée de la caisse contenant le trône appartenant au roi Ghézo.
L'arrivée de la caisse contenant le trône appartenant au roi Ghézo a été un des moments forts de la journée de mercrediImage : Séraphin Zounyekpe

C'est une semaine marquée par un événement sans précédent qui touche à sa fin au Bénin. Mercredi, (10.11) Cotonou a fêté le retour définitif sur leur terre d'origine des 26 œuvres d'art des trésors royaux d'Abomey restituées par la France. Après la fête, le Bénin fait face au défi du travail à mener avec ces oeuvres. Cette semaine des universitaires du pays se sont d'ailleurs penchés sur la question, avec Bénédicte Savoy et Felwine Sarr, co-auteurs du rapport sur la restitution du patrimoine africain commandé par la présidence française en 2018.

"Des résistances ont sauté"

Car après ces resitutions, les regards sont et seront de plus en plus tournés vers le Bénin. Bénédicte Savoy pense même que cet événement changera à l'avenir totalement la diplomatie mondiale. L'historienne française se dit persuadée de la fin des résistances auxquelles on était habitué depuis les indépendances. "Ces résistances ont sauté, les verrous psychologiques ont sauté, les opinions publiques en Europe en particulier la jeunesse supporte de moins en moins l'idée d'avoir un privilège culturel d'accès à ces patrimoines, tandis que leurs homologues d'Afrique n'ont pas accès à ce patrimoine pour des raisons de visas, pour des raisons économiques", assure-t-elle. "Cette nouvelle justice patrimoniale s'est engagée aujourd'hui, je suis persuadée que les restitutions seront une chose tout à fait naturelle, paisible au 21è siècle, et que l'acte fondateur de cette entrée dans une ère nouvelle a été posé ici à Cotonou." 

Bénédicte Savoy confiante en l'avenir

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"Le travail ne fait que démarrer"

Les restitutions au Bénin pourraient en amener d'autres sur le continentImage : Séraphin Zounyekpe

Une nouvelle ère positive, mais qui confère une responsabilité historique au Bénin, qui devient ainsi un modèle. "Il y a donc une image à préserver", pour l'économiste et écrivain sénégalais Felwine Sarr. Selon lui, l'élite béninoise en général et les universitaires en particulier ont un rôle fondamental à jouer, notamment par rapport à l'éducation et à la sensibilisation sur la valeur de ces biens. "Cet événement ouvre des chantiers, des chantiers épistémologiques, sur l'histoire, sur l'histoire de l'art, des chantiers anthropologiques", insiste-t-il.

"Et tout ce travail-là c'est un travail de veille d'universitaires. Et donc du coup le travail n'est pas fini, il ne fait que démarrer et la présence des objets ouvre des questionnements nouveaux, ces questionnements nouveaux ce sont les universitaires qui doivent les prendre en charge."

Des échanges à venir

Ces objets qui reviennent au Bénin ont aussi une signification pour les peuples voisins, voire au-delà. Bénédicte Savoy y entrevoit un des grands espoirs de cette restitution : les objets pourront faire objet d'échange, à l'intérieur de l'Afrique ou entre le continent et les Amériques par exemple qui ont aussi des contacts spirituels avec l'Afrique. "Les musées entre eux, les grands musées internationaux ils se prêtes les œuvres les uns les autres quand ils peuvent se rendre les prêts", explique-t-elle. "Le Pape dit au Louvres, « je vous prête les grands tableaux du Vatican si vous nous prêtez Léonard de Vinci ». Et donc désormais, les musées du Bénin et les musées qui récupèreront des œuvres à eux pourront être dans la position de dire on vous prête, dans 15 ans, dans 20 ans, dans 30 ans notre Guézo, en échange on voudrait la Joconde. Cela jusqu'à maintenant n'était absolument pas possible puisque les pays africains n'avaient pas de patrimoines propres à mettre en jeux dans ce genre d'échanges internationaux."

Les objets béninois pourront aussi servir de monnaie d'échange avec d'autres paysImage : Gao Jing/Xinhua/imago images

Avant cela les objets restitués, resteront trois mois à la présidence.  Ils seront ensuite transportés à l'ancien fort portugais de Ouidah et à la maison du gouverneur, jusqu'à l'ouverture d'un nouveau musée à Abomey.

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