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Washington-Moscou : il y a 60 ans le "téléphone rouge"

Marcel Fürstenau | Carole Assignon
29 août 2023

L'invasion russe de l'Ukraine, et la crise mondiale qu'elle provoque, rappelle d'une certaine manière les tensions lors de la crise des missiles à Cuba, il y a 60 ans.

Discussion au sujet de la crise à Cuba en 1962
Réunion au sujet de la crise à Cuba en 1962Image : akg-images/picture alliance

Les troupes ukrainiennes ont annoncéce mardi (29.08.2023) s'être enfoncées plus profondément dans les lignes de défense russes près de Robotyne, un village du front sud qu'elles revendiquent avoir repris.

Cette guerre en Ukraine qui a des répercussions dans le monde entier, rappelle d'une certaine manière les tensions lors de la crise des missiles à Cuba, il y a 60 ans. Une crise durant laquelle le monde avait failli sombrer dans une confrontation nucléaire et à l'issue de laquelle les deux grandes puissances de l'époque, les Etats-Unis et l'Union soviétique, avaient convenu de mettre en place une ligne directe entre Washington et Moscou, un " téléphone rouge " pour éviter à l'avenir de pareilles tensions. 

Tension à Cuba

Octobre 1962... la situation géopolitique mondiale est tendue. L'Union soviétique commence à installer des plateformes de lancement de missiles nucléaires sur le territoire de son allié, Cuba.

Les Etats-Unis, lorsqu'ils s'en rendent compte, imposent un blocus naval pour empêcher la poursuite du projet.Quand plus tard un avion américain de reconnaissance américain U-2 est abattu au-dessus de Cuba, le monde redoute l'escalade.

Mais au dernier moment, coup de théâtre : le dirigeant soviétique de l'époque, Nikita Khrouchtchev, annonce sur Radio Moscou le démantèlement et le retrait des bases de missiles à Cuba. C'est le soulagement.

Le choc d'une catastrophe qui vient d'être évitée est profond et pousse les deux parties à réfléchir à des mesures pour éviter à l'avenir une crise semblable. Ils se mettent d'accord pour établir une ligne de communication directe entre Washington et Moscou : c'est le téléphone rouge.

Les Etats-Unis imposent un blocus naval pour empêcher la poursuite du projet d'installation de missiles à Cuba.Image : akg-images/picture alliance

Pas un téléphone, mais un télex

Dix mois après la crise des missiles de Cuba, le 30 août 1963, il y a 60 ans donc, la ligne directe entre Washington et Moscou est opérationnelle.

Cependant, il ne s'agit pas d'un téléphone, mais simplement d'un téléimprimeur pour des messages écrits. Une technique plutôt démodée, même à l'époque. "Mais contrairement à un téléphone, il est protégé contre les écoutes", souligne l'historien Bernd Greiner.

Les superpuissances y auraient attaché une grande importance. "Ils voulaient s'assurer qu'aucune autre partie - quelle qu'elle soit - ne puisse surprendre leur communication mutuelle." La première phrase envoyée des États-Unis à l'Union soviétique à titre de test était énigmatique. Elle disait ceci : "Le renard brun rapide a sauté par-dessus le dos du chien paresseux 1234567890".

Le président américain John F. Kennedy au moment de la crise à CubaImage : AP Photo/picture-alliance

Objectif : calmer l'opinion publique mondiale

Selon Bernd Greiner il s'agit en fait d'un acte symbolique :" C'était un signal extérieur pour rassurer le public mondial sur le fait que la valeur de la communication mutuelle d'urgence avait été comprise."

Le téléphone rouge n'est donc pas réellement un téléphone comme on peut le voir dans certains films.

Dans sa première forme de téléimprimeur, celui-ci n'a pas souvent été utilisé. Lorsque la paix mondiale semble sérieusement menacée, c'est en effet le téléphone classique qui sonne.

Le monde change et avec lui la "hot line"

De nos jours, cette ligne directe s'est transformée en téléphone satellitaire. Avec la chute du mur de Berlin en 1989, la fin des dictatures communistes en Europe de l’Est et l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, un système d’alerte précoce entre Washington et Moscou semble être désormais superflu.

En outre, les innovations technologiques, en particulier internet, offrent des options de communication rapides. La connexion directe entre Washington et Moscou est à la pointe de la technologie depuis des décennies. Et il existe également des canaux de communication entre les autres capitales du monde en cas de crise.

Si la ligne rouge est un dispositif d'alerte de longue date, il est aujourd'hui difficile d'évaluer son efficacité depuis le début de la guerre en Ukraine.

Le chercheur Bernd Greiner doute qu'une ligne téléphonique puisse actuellement contribuer réellement à la résolution de la guerre en Ukraine. Il explique notamment que la communication établie entre les militaires, mais aussi entre les diplomates, a été rompue. Et qu'il y a une sorte de mutisme à ce niveau.